Forfait-jours, puis-je y recourir?

Posté le 4 Nov, 2019

Qu’est-ce que le forfait jours?

Le forfait-jours est une des différentes manières d’organiser la durée du travail des salariés.

Il s’agit d’une durée de travail dérogatoire au principe des 35 heures hebdomadaires.

Le forfait-jours permet, en effet, de fixer un nombre de jours de travail dans l’année (maximum 218 jours). Ainsi, la durée du travail n’est pas décomptée en heures mais en jours ou demi-journées.

Il offre, en principe, plus de flexibilité notamment pour les petites entreprises.

En effet, le forfait-jours exonère l’entreprise des dispositions relatives aux heures supplémentaires. De même que celles relatives aux durées maximales journalière et hebdomadaire du travail.

Seules les règles applicables aux repos journalier et hebdomadaire doivent être respectées.

Toutefois, le forfait-jours n’est pas toujours accessible aux petites entreprises. Il convient de bien connaître les exigences de la loi et de la jurisprudence pour éviter tout risque.

Comment mettre en place un forfait jours?

La mise en place du forfait annuel en jours nécessite :

  • d’une part, un accord collectif conclu au niveau de l’entreprise ou, à défaut, un accord conclu au niveau de la branche qui autorise la signature de conventions individuelles de forfait-jours;
  • d’autre part, une convention individuelle de forfait conclue ensuite avec chaque salarié concerné.

Toutefois, les petites entreprises n’ont pas toujours des représentants du personnel avec qui négocier un accord d’entreprise sur le forfait-jours.

Or, l’autre possibilité qui est de s’appuyer directement sur les dispositions de la convention collective n’est pas toujours évidente. Ces dispositions étant parfois inapplicables.

Pourquoi les accords de branche ne sont pas toujours applicables ?

En 2000, lors du passage aux 35h, le forfait-jours était un mode dérogatoire d’aménager le temps de travail. Il supprime toute référence à un nombre d’heures de travail pour les salariés qui disposent d’autonomie dans l’organisation de leur travail.

Ce dispositif a été jugé non conforme au droit de l’Union européenne. Il est considéré comme non respectueux de la durée maximale hebdomadaire de 48 heures de travail. Et par la même occasion, de l’obligation de rémunération des heures supplémentaires.

Ainsi, la Cour de cassation ne pouvait rester sourde aux alertes du Comité européen des droits sociaux.

Elle a validé le dispositif du forfait-jours tout en exigeant des impératifs de protection de santé, de sécurité et de droit aux repos.

Les accords collectifs doivent donc comporter des stipulations qui respectent ces impératifs.

Depuis 2011, la cours de cassation a ainsi invalidé un bon nombre d’accords de branche jugés insatisfaisants en termes de garanties pour le salarié.

Conséquences :

Ces arrêts on causé une insécurité juridique. En effet, lorsque l’accord collectif de base est invalide, le salarié en forfait-jours est bien fondé pour demander:

  • le paiement d’heures supplémentaires (sur les 3 dernières années),
  • une indemnité pour travail dissimulé
  • et des dommages et intérêts.

Que doit comporter l’accord collectif ?

Pour donner un nouveau cadre aux accords collectifs mettant en place le forfait-jours, le code du travail a repris les principales jurisprudences. Il énumère ainsi les différentes mesures que doit comporter un tel accord:

1- les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait;

2- la période de référence du forfait, qui peut être l’année civile ou toute autre période de douze mois consécutifs ;

3- le nombre d’heures ou de jours compris dans le forfait, dans la limite de 218 jours;

4- les conditions de prise en compte des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;

5- les caractéristiques principales des conventions individuelles, qui doivent fixer le nombre de jours compris dans le forfait ;

6- les modalités selon lesquelles l’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

7- les modalités selon lesquelles l’employeur et le salarié communiquent périodiquement sur:

  • la charge de travail du salarié,
  • l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle,
  • sa rémunération
  • l’organisation du travail dans l’entreprise .

8- les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion.

Comment remédier aux lacunes des dispositions de branche dont vous dépendez ?

La « Loi travail » du 9 août 2016 offre la possibilité de combler certaines lacunes de l’accord collectif de branche.

Toutefois, cela est possible uniquement dans le cas où l’insuffisance des dispositions de branche est liée aux 3 modalités selon lesquelles :

– l’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

– l’employeur et le salarié communiquent périodiquement sur:

  • la charge de travail du salarié,
  • l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle,
  • sa rémunération
  • l’organisation du travail dans l’entreprise

– le salarié peut exercer son droit à la déconnexion.

Si toutes les autres mesures sauf celles-ci sont prévues par l’accord de branche, vous pourrez recourir au forfait à condition :

1. d’établir un document de contrôle du nombre de jours travaillés dans l’année ;

2. de s’assurer que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos (quotidien et hebdomadaire) ;

3. d’organiser a minima un entretien par an afin d’évoquer notamment sa rémunération, sa charge de travail, l’organisation de son travail, la compatibilité entre temps de travail et vie privée ;

4. de définir et de communiquer aux salariés concernés les modalités d’exercice de leur droit à la déconnexion.

Attention : Le non respect des dispositions légales autres que ces 3 mesures ne peut pas être couvert. L’accord sera tou bonnement inapplicable dans un tel cas.

Si votre convention collective ou accord de branche est non conforme aux autres dispositions légales, vous êtes obligé de conclure un accord d’entreprise pour pouvoir recourir au forfait-jours.

Certaines conventions collectives renvoient tout simplement à l’accord d’entreprise. Dans ces cas, faute d’un accord d’entreprise, vous ne pouvez pas recourir au forfait-jours, même avec l’accord exprès du salarié.

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Rédigé par K. SENE

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